Éloge de l’incertitude

La société aime faire un lien proportionnel entre la certitude d’un propos et l’intelligence de la personne qui le déblatère. Le rapport est simple : quand tu doutes*, ça donne une impression de faiblesse (d’esprit et plus); quand tu parles de manière péremptoire, ça donne une impression d’expertise.

Le mot-clé, c’est “impression”. Parce que par définition, une impression est une projection. D’encre sur une feuille, souvent, ou, comme ici, d’un manque de confiance en soi sur autrui. Une impression n’est donc qu’une visualisation biaisée et simplifiée d’une (possible) réalité sous-jacente. Il est souvent intéressant de la déconstruire pour voir ce qu’il y a derrière.

Alors commençons par nous amuser à détecter et exposer les “experts” coupables d’ultracrépidarianisme, qui, étant donné l’effet Dunning-Kruger, représentent une partie non négligeable des “gens qui affirment”. Bref, s’amuser à faire tomber de leur piédestal ceux qui “savent” sans savoir.

Plus essentiellement, apprenons à célébrer l’incertitude. Parce que quelqu’un qui doute de ce qu’il dit, c’est la manifestation de son intelligence qui entrevoit déjà les possibles failles de son discours, les différents contextes qui pourraient changer son affirmation, les zones d’ombre à éclaircir pour préciser son propos. Et puis, tout simplement parce que l’incertitude ouvre à la discussion et à la découverte.

* Le mot “incertitude” du titre indique bien qu’il est ici question d’hésitation, voire de tâtonnement, précisément ce qui nourrit la méthode scientifique. Pas de douter de ce qui est testé et re-testé, et donc parfaitement connu (la vitesse de la lumière dans le vide, les bienfaits de la vaccination ou l’absence de crème dans la carbonara)

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